Une commission spéciale a été mise en place après la résolution adoptée le 15 mai dernier par le Sénat en RDC. Cette commission est chargée d’examiner le réquisitoire de l’auditeur général près la Haute Cour militaire, qui demande la levée des immunités de l’ex-président et sénateur à vie Joseph Kabila.
Fin avril, les autorités congolaises ont en effet annoncé avoir déposé au Sénat une requête de levée d’immunité contre l’ex-président, accusé de participation aux rebelles du M23.
“La justice congolaise a rassemblé un maximum de preuves tangibles et irréfragables qui étayent l’implication claire, la participation directe du sénateur à vie Joseph Kabila dans les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité, les massacres des paisibles citoyens” dans l’Est du pays, a déclaré le ministre de la Justice Constant Mutamba.
L’ancien président de la République est accusé de “trahison, crime de guerre, crime contre l’humanité et participation à un mouvement insurrectionnel”, a indiqué le ministre.
Qu’encourt réellement Joseph Kabila si ses immunités lui sont retirées ? Peut-il être condamné ? Wendy Bashi a posé ces questions au politologue Christian Moleka. Son analyse ci-dessous…
Nous sommes pratiquement dans la continuité de ce qui a commencé depuis l’annonce de son retour par Goma. La position gouvernementale qui était de fermer son parti politique, de le déclarer pratiquement ennemi de la République. Et donc le cheminement normal, c’est la levée de l’immunité avec possibilité de poursuites judiciaires. Peut-être une condamnation par contumace qui manifestement conduirait à une forme d’élimination politique de l’homme.
DW : Mais est-ce que Kabila aujourd’hui s’il revient en République démocratique du Congo pourrait être amené à jouer un rôle ?
Tout dépend de comment il veut revenir. Est-ce qu’il veut revenir comme acteur ? On a vu qu’il avait récemment renommé au sein de son parti politique une forme de représentation et que le le parti commençait un peu à réprendre du poil de la bête. On a également vu que sur certains médias étrangers il a parlé d’un possible retour politique. Et donc il y avait des signaux qui laissaient penser que l’homme voulait rejouer un rôle. S’agissait-il d’une stratégie tendant à mener le pouvoir vers la faute ou c’était une stratégie de retour politique ? On ne le saura peut-être pas maintenant.
Mais ce qui est vrai, c’est que le pouvoir a anticipé. Et puisque la perspective de 2028 est dans la tête de tout le monde et donc l’horizon d’un retour de Kabila titille Kinshasa. Et les lynchages publics sous Kabila, c’est une stratégie assez rôdée pour éliminer la possibilité de l’horizon d’un retour politique de Kabila d’ici 2028. Après, c’est à lui comme acteur de se repositionner s’il revient comme acteur visible ou s’il garde toujours ce rôle qu’il aime dans l’ombre, tirant les ficelles.
DW : Une autre actualité aussi, c’est qu’on a vu donc le PPRD a été indexé, le parti de l’ancien président Joseph Kabila. Aujourd’hui, il est question du parti de Franck Diongo, il est question du parti de Corneille Nangaa. On assiste à un verrouillement comme ça de la scène politique congolaise. Qu’est-ce que ça laisse présager selon vous ?
Franck Diongo a rejoint le M23. Corneille Nangaa également. Et donc pour Kinshasa, il y a un lien clair entre une frange de l’opposition et la rébellion. Cette dynamique-là réduit les marges à la fois de la cohésion, des efforts mis en place pour recréer les conditions d’un dialogue à l’interne. Cela réduit les possibilités de décrisper et donc ça crée d’autres formes de clivage qui vont nous conduire vers une complexification de la crise parce que lorsque vous fermez un parti politique, ça veut dire que vous poussez indirectement ces acteurs à trouver d’autres formes d’expression et qui malheureusement, ne peuvent pas être démocratiques.
Avec msn